jeudi 27 janvier 2011

En fuite

Vous savez, ces temps-ci, on entend plein d'histoires d'horreur à propos de négligence de parents envers leurs enfants... Les gros cas font les nouvelles, mais il y en a tellement plus que ce qu'on sait, dans le fond. Et ces jeunes là, c'est souvent dans des classes comme la mienne qu'ils aboutissent.

Depuis quelques jours, j'ai un élève en moins. Troublé Porte-Panier. C'en est un qui vient d'un environnement pas très rose. Sa mère est une femme très bien. Elle a une tête sur les épaules et elle encadre bien son fils. Elle s'organise pour qu'il reçoive l'aide dont il a besoin.

Par contre, le père du jeune, c'est une autre histoire. Il n'est clairement pas tout là. J'imagine que c'est une des raisons pour lesquelles les parents de Troublé Porte-Panier sont séparés et que la mère a refait sa vie avec un autre homme.

Le père aussi a refait sa vie et a eu deux autres enfants. Et depuis quelques temps, il ne peut plus être en contact avec ses deux plus jeunes. Pendant un petit bout, cette interdiction de contact a aussi été appliquée à Troublé Porte-Panier, jusqu'à ce qu'elle soit levée, à la demande de mon élève.

Maintenant, on se rend compte que ce n'était pas une bonne idée. Mardi, Troublé Porte-Panier s'est sauvé de chez lui pour aller rejoindre son cher papa. Et depuis, il appelle la police tous les jours pour dire qu'il va bien mais il refuse de dire où il est. Son père et lui bougent constamment. Ils sont évidemment recherchés.

Troublé Porte-Panier est un jeune assez influençable que son père est probablement en train de monter contre sa mère, de « brainwasher », carrément. Et comme il n'est pas médicamenté, on ne sait pas trop dans quel état il va revenir le jour où il va finir par revenir. En fait, il ne reviendra sûrement pas dans ma classe, ni chez lui, quand il se fera « attraper ». Ce qui l'attend, c'est un centre jeunesse.

Ça me décourage tellement, si vous saviez... Parce que dans ma classe, Troublé Porte-Panier m'a montré à quel point il peut réussir. Il a plein d'intérêts, il est enthousiaste et super attachant. S'il le veut, il a un bel avenir devant lui. Mais ça, c'est à la condition que son fucké de père le lui permette.

Comme me l'a dit mon père à moi, quand je lui ai raconté tout ça: « Tes élèves peuvent bien avoir de la misère, quand on regarde d'où ils viennent! »

dimanche 23 janvier 2011

Quelle semaine!

*Soupir*

Bon, j’ai vraiment eu une GROSSE semaine. Même si je les aime, mes p’tits troublés, ils tirent du jus! Ouf!

Les crises se sont succédées à une vitesse assez incroyable. Dès qu’un de mes élèves allait mieux, un autre éclatait. Et puis le premier sautait à nouveau. Et ensuite, un troisième se mettait de la partie.

D’abord, Troublé à Casquette a recommencé à fesser dans le matériel, dans les murs, dans tout ce qu’il trouve. On a beau lui rappeler qu’il doit déjà faire du service communautaire pour payer un bris fait plus tôt cette année, ça ne le fait arrêter que quelques instants. On dirait qu’une heure après, il a déjà oublié, pris tout entier par sa colère, par son découragement.

Cette semaine, j’ai dû lui demander de se mettre au travail beaucoup plus souvent que d’habitude. Et j’ai eu droit à des refus la majorité du temps. Cette semaine, Tess (c’est la technicienne en enseignement spécialisé – TES – qui travaille avec moi) et moi, nous avons dit à Troublé à Casquette que son comportement était inadéquat et qu’il ne pouvait pas nous crier après, que c’était inacceptable. Alors, il s’est mis à inventer des affaires, à dire que je l’envoie chier (oui, oui!) et que je « lui manque de respect ». Ouais, vraiment. Il est à deux doigts de la suspension. Même moi, j’ai des limites. Évidemment, ça le frustre, alors… Cercle vicieux, vous dites?

Y’a aussi Troublé Envahissant qui a décidé que ça n’allait pas, cette semaine. Quand on lui a demandé de laisser l’ordinateur parce que ce n’était pas son tour pendant une pause, il ne l’a pas pris. Il m’a annoncé qu’il ne me parlerait plus jamais. Remarquez, je commence à être habituée, il peut me dire qu’il me déteste un jour pour se raviser le lendemain et chanter mes louanges. Je suis soudainement la meilleure prof qu’il a jamais eue et tout le tralala. Jusqu’à la prochaine crise. Mais, cette semaine, il a même pitché des affiches par terre, dans sa frustration.

Et finalement, Troublé Analphabète a passé sa première journée complète en classe. On avait demandé à une éducatrice de la Commission scolaire de venir l’observer, pour qu’ils se rendent compte qu’il ne fonctionne pas avec nous. Mais pour faire exprès, quand Troublé Analphabète a refusé de travailler, a chiffonné sa feuille et l’a lancée à travers le local; quand il s’est mis à nous traiter de putes en chuchotant, l’observatrice n’était pas là! Elle est arrivée à la deuxième période, alors que Troublé Analphabète jouait avec des blocs, ce qu’il aime bien. Elle a donc constaté qu’il fonctionne à merveille dans ma classe. Évidemment, en après-midi, la situation a dégénéré à nouveau, mais elle était partie… Argh!

En fait, cette semaine, j’ai eu l’impression de tout faire de travers… J’ai eu bien besoin du soutien de mes collègues qui me rassurent et qui me répètent de ne pas ME remettre en question. Je crois que l’une d’elle a bien résumé la situation : je veux plus que les élèves. Je veux qu’ils réussissent et qu’ils cheminent encore plus qu’eux-mêmes. Je dois me détacher, un peu…

lundi 17 janvier 2011

Les risques du métier

Oh boy! J’vous dis, une chance que je suis faite relativement forte! J’aurais jamais cru qu’enseigner pouvait être aussi dur physiquement!

Non, je plaisante! Mais plus sérieusement, il m’est arrivé trois petits incidents dernièrement avec mes élèves qui me laissent des bleus. Eh oui! C’est pas facile, la vie de prof! ;)

D’abord, je dois vous expliquer que mes troublés (i.e. les élèves de la classe dont je suis titulaire… je ne savais pas comment les surnommer et comme ils ont tous un paquet de troubles, on y va pour ça, d’accord? Ne me lancez pas de tomates…) sont réunis à deux autres groupes pour leurs cours d’éducation physique. Les profs, les techniciennes de ces classes et moi-même sommes toujours présents avec eux au gymnase. Ben oui, y’en faut du monde pour ces p’tits pits là! Ils en valent chacun quatre, c’est calculé!

Toujours est-il qu’on a quand même la chance d’avoir une vraie enseignante d’éducation physique avec nous. Mais nous sommes là et nous devons généralement participer aux jeux et activités pour montrer l’exemple, vous savez… Oui, parce que pour les troublés, toutes les raisons sont bonnes pour ne pas faire ce qu’on leur demande. En étant avec eux, ça aide, disons.

Mais, c’est qu’ils sont grands! Et forts! Et gros (parfois)! Et pas moi!!!

Arriva donc ce qui devait arriver et pendant un cours, en décembre, j’ai reçu un violent coup de tête sur le nez. C’était un accident, évident, mais ayoye quand même! Et puis quelques minutes plus tard, BANG! Coup de coude sur la bouche! Là, y’a vraiment fallu que je me retienne pour ne pas sacrer…

Je ne pensais pas qu’une situation semblable pouvait m’arriver avec mes p’tits comédiens du lundi soir parce qu’on est quand même pas dans un cours d’éduc mais il paraît que ce que je pense, on s’en balance! Car ce soir, vlan! Encore un accident! Cette fois, c’était un coup de poing sur la joue.

J’en ai officiellement assez de servir de punching bag… Quelqu’un aurait des trucs pour m’aider à me protéger de mes élèves trop enthousiastes?